1 août 2025
Av P.E. Lumumba
Justice

RDC : Joseph Kabila poursuivi pour « crimes contre la paix » devant la Haute cour militaire

L’ex président congolais Joseph Kabila fait désormais face à des poursuites judiciaires devant la Haute cour militaire de la République démocratique du Congo (RDC). À compter de ce vendredi, il est jugé pour des faits qualifiés de « crimes contre la paix », en lien avec sa présumée complicité avec le groupe rebelle M23, soutenu par le Rwanda.

Absent du territoire national pendant plus de deux ans, bien qu’il ait récemment été aperçu dans la région de Goma, Joseph Kabila ne devrait pas comparaître lors de l’ouverture de son procès. L’acte d’accusation énumère plusieurs chefs graves, parmi lesquels : participation à un mouvement insurrectionnel, atteinte à la paix et à la sécurité de l’humanité, homicide par arme à feu, trahison, apologie de la violence, viol, torture, déportation, ainsi qu’occupation violente de la ville de Goma.

Ces charges, qui relèvent du droit pénal militaire congolais, sont passibles de la peine de mort. Bien qu’un moratoire sur les exécutions ait été levé en 2024, aucune peine capitale n’a été appliquée jusqu’ici.

Âgé de 54 ans, Joseph Kabila a succédé à son père Laurent-Désiré Kabila après l’assassinat de ce dernier en 2001. Il a exercé la présidence jusqu’en 2019 avant de se retirer progressivement de la scène politique. Sa coalition avec l’actuel président Félix Tshisekedi avait volé en éclats deux ans après le transfert de pouvoir.

En avril dernier, Constant Mutamba, ex-ministre de la Justice, avait saisi la justice militaire pour qu’elle engage des poursuites contre Joseph Kabila pour son rôle présumé dans le soutien au M23. Par la suite, le procureur général militaire a sollicité, puis obtenu, la levée de son immunité parlementaire auprès du Sénat, par 88 voix contre cinq. Cette immunité lui était accordée de droit en tant qu’ancien chef de l’État et sénateur à vie.

L’un des éléments phares de l’accusation repose sur un témoignage selon lequel l’ex-président aurait eu une conversation téléphonique avec un dirigeant du M23 à propos d’un plan soutenu par Kigali visant à éliminer le président Tshisekedi. Kabila aurait cependant déconseillé une telle action, craignant que cela ne transforme le président en « martyr », et aurait plutôt suggéré un coup d’État militaire comme stratégie plus appropriée.

Dans une rare déclaration en ligne faite le 23 mai, après la levée de son immunité, Joseph Kabila avait dénoncé une dérive autoritaire du régime actuel et critiqué le système judiciaire, qu’il qualifie désormais d’outil répressif d’un pouvoir en déclin.

Retour controversé à l’Est

Fin 2023, l’ancien président avait quitté le pays, mais il est revenu à Goma en mai dernier, une ville aujourd’hui partiellement contrôlée par le M23 et d’autres milices locales. L’Est de la RDC, frontalier du Rwanda et riche en minerais, demeure une zone en proie à des violences récurrentes depuis près de trois décennies. Ces derniers mois, les tensions ont connu une nouvelle escalade avec la prise de Goma et de Bukavu, deux chefs-lieux provinciaux, par le M23.

Le 19 juillet à Doha, un accord de principes en faveur d’un cessez-le-feu permanent a été signé entre le M23 et le gouvernement congolais, suscitant l’espoir d’un retour à la paix. Cependant, les affrontements se poursuivent : au moins onze personnes ont perdu la vie dans des combats récents dans le Masisi (Nord-Kivu), opposant le M23 à des milices fidèles à Kinshasa.

Bien que le Rwanda continue de nier tout appui militaire au M23, un rapport récent des Nations Unies souligne l’implication « déterminante » de ses forces armées dans les offensives menées par les rebelles au début de l’année.

Un proche de Joseph Kabila, interrogé par l’AFP, affirme qu’aucune alliance officielle n’a été conclue entre l’ex-président et le M23, tout en admettant qu’ils partagent un objectif commun : mettre fin au régime de Félix Tshisekedi.

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